Introduction générale
Du fait de l'amélioration des performances des ordinateurs, des langages de programmation, des méthodes numériques et des modèles physiques, la complexité des problèmes pourvant être étudiés par simulation numérique s'accroît sans cesse. En particulier, la demande des ingénieurs se tourne vers des possibilités de traiter des problèmes couplés. A cet effet, des actions de recherche et développement sont engagées dans le cadre du projet TrioCFD avec deux voies plus particulières :
La première concerne le couplage de modèles physiques. En particulier, pour les études de thermohydraulique des réacteurs nucléaires, il est important d'étudier les couplages entre un milieu fluide libre et un milieu poreux. La seconde voie développée concerne le couplage entre différents codes de calcul. En effet, certains codes de calcul, comme TrioCFD, sont plus spécialisés dans des approches locales des écoulements alors que d'autres codes, comme Cathare, sont optimisés pour traiter des problèmes à plus grande échelle (on les appelle codes systèmes). Pour certaines applications, il peut être important de simuler l'ensemble d'un circuit par des modèles macroscopiques et de simuler plus finement une partie de ce circuit.
Couplage multiéchelle
Dans de nombreuses applications, il est important de modéliser les transferts à l'interface entre un milieu libre et un milieu poreux. Dans le cadre de l'étude des réacteurs nucléaires, le coeur est fortement chargé en combustible nucléaire et il est généralement modélisé comme un milieu poreux équivalent. Les autres parties du réacteur étant beaucoup moins chargées en parties solides, une modélisation poreuse n'est pas toujours nécessaire. Il est par conséquent important de coupler les modèles libre et poreux de manière précise.
Couplage entre un milieu libre et un milieu poreux
Le coeur d'un réacteur nucléaire est composé de centaines de crayons de combustible nucléaire. L'espace entre ces crayons de combustible est très petit. Simuler finement l'écoulement à cette échelle sur l'ensemble des crayons est, d'une part, trop coûteux en temps de calcul et, d'autre part, inutile dans la plupart des cas car l'écoulement y est souvent plus simple que dans les régions libres adjacentes. C'est la raison pour laquelle il est intéressant de modéliser le coeur du réacteur de manière moyennée.
L'écoulement dans les régions libres est en revanche plus complexe et il est important d'en capturer toutes les échelles. Pour certains problèmes, la difficulté principale de la modélisation réside alors dans la prise en compte du couplage entre les deux échelles de description de l'écoulement.
La figure ci-dessus illustre un cas d'application d'un tel couplage dans le cas d'une configuration se rapprochant d'un réacteur nucléaire, en montrant une comparaison entre échelle locale (en haut) et échelle moyennée (en bas). On voit en particulier que les caractéristiques principales de l'écoulement sont bien reproduites par le modèle couplé, que ce soit au sein du milieu chargé ou dans les régions libres.
Couplage inter-codes
Couplages entre TrioCFD et d'autres codes
Tout code de calcul possède son domaine d'application pour lequel il est optimisé. Dans le cas des réacteurs nucléaires, le code système Cathare est ainsi optimisé pour simuler les écoulements à l'échelle de l'ensemble du réacteur et pas uniquement du coeur. En revanche, contrairement au code TrioCFD, il n'est pas adapté à la simulation fine d'écoulements tridimensionnels. Dans certaines applications, il est important de prendre en compte à la fois l'effet système et le détail de l'écoulement dans certaines parties du circuit. C'est pourquoi il est important de pouvoir coupler les codes entre eux.
Couplage TrioCFD / Cathare
Le réacteur rapide à gaz présente de nombreux avantages quant au cycle du combustible. Cependant l'hélium utilisé n'étant pas un caloporteur très efficace, l'évacuation de la puissance doit être étudiée de manière approfondie. Pour obtenir les performances requises, même en cas d'évacuation de la puissance résiduelle après une chute de barres, il peut être nécessaire de maintenir l'hélium sous pression et de maintenir une convection forcée. Des boucles spécifiques sont prévues pour l'évacuation de la puissance résiduelle, qui court-circuitent les boucles primaires et possèdent leurs propres échangeurs. On les appelle boucles DHR (pour Decay Heat Removal).
C'est pourquoi l'étude précise de l'évacuation de puissance en situation incidentelle revêt une importance cruciale : dans des conditions de dépressurisation et d'arrêt brutal du réacteur, il faut être capable de prédire la durée et l'intensité de la convection forcée éventuellement nécessaire. L'établissement de la convection naturelle dépend en premier lieu de la température du gaz qui s'engage dans les boucles DHR.
Or celle-ci peut être fortement influencée par le comportement tridimensionnel de l'hélium dans le plénum : plus il y aura stratification, plus le gaz très chaud restera bloqué dans le plénum, et plus la mise en place de la convection naturelle sera retardée. C'est pour étudier l'influence de ces effets 3D dans le plénum supérieur que nous travaillons sur le couplage entre les codes Cathare et TrioCFD.
Ce dernier est chargé de modéliser le mélange et la stratification des flux d'hélium sortant du coeur, et d'en déduire la température du gaz qui ressort vers les boucles DHR.